Contrairement aux hommes, c’est en hiver que la nature se défait de ses vêtements et expose sa nudité. Seules quelques feuilles fripées persistent, ne sachant masquer l’intimité des végétaux. Progressivement, les couleurs s’uniformisent, tout se met au diapason d’une lumière qui a perdu son éclat. Le paysage s’estompe en une teinte sourde et terne. Alors, lorsqu’une tache d’un blanc pur est aperçue au loin, le regard est captivé. L’esprit presse les jambes de parcourir les derniers mètres pour retrouver l’objet improbable. Une tétine, abandonnée par une jeune pousse de l’année, a trouvé là un endroit pour s’épanouir sous le soleil déclinant. C’est un fragile moment de tendresse dans cet univers sans état d’âme. Juste quelques perles de rosée posées sur la totoche, et qui font écho aux larmes qui coulent peut-être encore sur les joues de l’enfant… L’objet, tel un fruit étrange, a été enfilé sur une mince branchette de ligneux. Il est peu probable qu’il retrouve un jour son jeune propriétaire, mais il est mieux ainsi que de se dégrader au sol sous un tapis de feuilles mouillées. Il n’est pas sûr que l’arbuste trouve du réconfort avec cette sucette quand il devra faire face à la rudesse de l’hiver.
Hirtzfelden, le 12 décembre 2025