Le grand cormoran est un excellent pêcheur. Les palmes qui prolongent ses pattes lui permettent de progresser très facilement sous l’eau et le profilé de son corps le propulse à la vitesse d’une torpille sur le poisson qui coule ses derniers moments de tranquillité. Mais le cormoran a également passé son brevet de charpentier. Chaque année, il construit un nid au sommet d’un grand arbre transformé en HLM surpeuplé et bruyant. Ce qui constitue un atout pour la recherche de nourriture se transforme en course à handicap au moment de la nidification. Il a déjà bien du mal, en temps ordinaire, à faire décoller sa machine détrempée, mais lorsque le bec est encombré de branchages, il est difficile de pédaler tout en gardant son cap. Les fuligules morillons évitent soigneusement de se retrouver sur sa trajectoire ; ils savent qu’une collision risquerait d’être douloureuse pour eux. Une fois en l’air, la moitié de l’exploit est réalisé. Il reste encore à atterrir, ce qui n’est pas facile non plus, car le nid est construit à l’enchevêtrement des branches supérieures de l’arbre, souvent resserrées vers le tronc. Il bénéficie parfois de l’aide de son compagnon qui se saisit de l’encombrant fardeau avant qu’il ne se pose.
La Petite Camargue Alsacienne, le 18 avril 2025
