En l’apercevant de loin, on sait déjà que son existence a dû être bien plus difficile que celle de son voisinage et cette certitude ne cesse de grandir au fur et à mesure que l’on s’approche de lui. La base de son tronc est assez rectiligne, mais à un mètre de hauteur il part en vrille et expose une grosse bosse. C’est sans doute lié à un accident d’enfance, un méchant coup pris sur la tête par un engin qui s’est écarté du chemin. Il a mis du temps à s’en remettre. Pour avoir une chance de survie, il fallait à tout prix se redresser, en fabriquant du bois de réaction sur le dessus du tronc blessé. C’est un bois de tension dont les fibres, qui sont garnies intérieurement d’une couche supplémentaire de cellulose, se rétractent fortement en vieillissant. Le rétrécissement global du bois de tension tire le tronc vers le haut et permet à l’arbre de retrouver une certaine verticalité. Pour achever la « réparation », il se « décourbe » par le haut suite à un autre dépôt de bois de tension sur la face opposée. Ce valeureux vieillard dont la vie a été contrariée mérite notre respect.
Le Rothmoos, le 7 avril 2025
