Arbre à freux

Dans l’existence, certains moments sont redoutés plus que d’autres. La vieillesse figure sans doute parmi ceux-ci. C’est le privilège des humains  que d’avoir conscience des limites de leur existence terrestre et de savoir que leurs ressources physiques diminuent inexorablement un jour ou l’autre. Le végétal n’a pas de conscience et il n’est  donc pas capable d’envisager son avenir. Il subit pourtant la même et dure loi de la nature. Pour des raisons que l’on ignore, cet arbre n’est plus en mesure de produire des feuilles. Il est mort sur pied. Mais il a encore le privilège d’accueillir dans sa ramure dénudée une nuée de corbeaux freux qui viennent se toiletter et se reposer. Ils sont bien bruyants et leur chant n’est pas très agréable à entendre. Mais ils symbolisent la vie qui sait tirer profit du passé de toute chose… Comme le sujet n’est pas le plus gai, on se permettra un trait d’humour. Si les arbres étaient capables de penser, quelle serait leur plus grande hantise en prenant de l’âge? … De perdre leur majesté et devenir  des arbres « à freux ».

Ensisheim, Belle-île,  le 22 mai 2025